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30 avril 2014

Salon du dessin 2014 - Le peintre et son modèle - Pablo Picasso

 

 

 

 

 

 

30

 

J'ai vu ce dessin de loin, depuis l'allée. Et j'ai dit "whaoh !" intérieurement, avant de m'approcher. J'ai lu le nom du dessinateur... Pablo Picasso, bien sûr.

Pourquoi ce "whao !" ? Parce que sur un mur à coté d'autres dessins, celui-ci saute aux yeux. Tout simplement. Ce dessin est une évidence. Et c'est une Idée, pure et complexe, mise en scène simplement. Depuis, pour écrire cet article, j'ai vu beaucoup d'autres dessins de Picasso sur le même thème, et je pense que celui-ci est, de tous, le plus intellectuel, le plus conceptualisé, et à mes yeux le plus réussi. C'est une affaire de sensibilité personnelle, les lignes épurées et le minimalisme me touchent. Ce dessin pourrait être gravé dans la pierre, il m'évoque les dessins égyptiens, épurés pour que la trace en soit encore lisible après des milllénaires, et compréhensilbles à tous les hommes, quelle que soit leur langue.   Il est universel, intemporel et esthétique.

 

Dans ce dessin je regarde :

Les formes : courbes pour les corps et la palette, traits pour les pinceaux, le tableau. Elles sont douces et pures. Beaucoup de rondeur et de tendresse. Quelque chose d'érotique dans l'interpénétration de ces formes.

Les traits : je remarque qu'ils s'épaississent par endroit. Les rivets sur la tranche du tableau sont tracés finement, les traits épais sont donc un choix du dessinateur et pas un effet de l'encre sur un papier qui la laisserait un peu diffuser. Les contours des formes m'évoquent un vitrail

La composition : l'ensemble est cohérent, en équilibre et harmonieux.

Le dessin est complètement épuré et se limite à une représentation graphique de symboles :

- Les mains du peintre.
- Son oeil
- Ses outils : pinceaux et palette.
- Le tableau, limité à un plan dont on voit le profil.
- Le modèle, sa posture, attitude "posée" et esthétique

Le positionnement dans l'espace des différents éléments  :

Si on masque la tête du peintre et la tranche du tableau visible à gauche, et qu'on concentre le regard sur le modèle, les mains du peintre, les pinceaux... ce n'est plus le modèle en chair et en os que l'on voit, c'est le dessin du modèle en train de se faire, et le pinceau qui le trace.

C'est l'oeil du peintre, fixé sur le tableau, qui indique qu'en fait, le dessin est en face.

Par une seule représentation on voit ainsi à la fois le modèle et le dessin du modèle. C'est extrêment ingénieux.

Le peintre ne regarde pas son modèle, il a le regard fixé sur le tableau. Il a la vision du modèle en tête.

Le fait que le modèle et le dessin du modèle soient représentés ensemble, donne l'illusion que le pinceau effleure le corps du modèle. Et c'est aussi ce qui se passe. Quand on peint un visage on a vraiment l'impression d'en sculpter les reliefs et presque de toucher une peau. D'où la charge érotique perceptible dans ce dessin. On verra dans d'autres versions du même sujet dans la suite de cet article une accentuation de cet aspect. 

Le pinceau relie l'oeil du peintre à la tête du modèle en passant au centre de la main.

La simplification des formes :

- La main du peintre est limitée à une représentation de la pince pouce/index
- Les doigts du modèle sont dessinés sans souci d'exactitude anatomique, ils sont juste mis les uns à coté des autres (voir sa main droite), mais ils sont bien cinq.
- L'oeil occupe la plus grande partie de la surface du visage du peintre.
- Le corps du modèle est rendu avec la plus grande économie de moyens possible. Tout est limité à l'essentiel. Le beau mouvement des bras du modèle autour de son visage, l'expression de celui-ci, ses seins, le drapé du lit, les cheveux.

Les rehauts de blanc :

Ils sont étonnants, dans leur placement. Ils participent à l'équilibre des formes.

 

Picasso a dessiné et peint des centaines de versions de ce sujet.

the artist and his model

 

 

En voici quelques-unes, classées de la plus ancienne à la plus récente, elles explorent les différentes possibilités de placement des éléments et leurs représentations, mais pas seulement cela.

Picasso a vécu, pleinement. Une vie charnelle, intellectuelle et spirituelle intenses, où la réflexion ne pouvait être dissociée de l'action, et inversement. Ses dessins sont le fruit de cette dualité corps/esprit. Ce sont des notes prises au fil de sa pensée. Il les comparait à un journal intime, et on voit qu'ils le sont.

 

 

1927 - (1)

1927 - modèle à coté du tableau - on voit le dessin - représentation figurative

 

1927 - (2)

1927 encore - modèle à coté du tableau - dessin visible - représentation non figurative

 

1953 - 24

1953 - le tableau sépare le modèle du peintre - on ne voit pas le dessin - le peintre regarde la toile

 

1963 - 10

1963 - le modele est face au peintre, derrière le tableau, le tableau projete une ombre sur le modèle, le dessin est visible mais limité à un trait gribouillé - le peintre regarde le modèle

 

1963 (4)

1963 - le tableau cache pratiquement tout le modèle - le dessin est visible et se poursuit à l'arrière, comme si la toile était transparente

 

1964

1964 - on ne voit pas le modèle - seulement le peintre et le tableau

 

1965

1965 - on ne sait pas si on voit le modèle ou son dessin, il y a comme deux plans blancs côte à côte

 

1966

1966 - ici il n'y a que le peintre et le dessin, ni tableau ni modèle.  La date est en miroir (effet volontaire ou photo à l'envers ?)

 

1968

1968 - sur cette version la date est encore écrite à l'envers, comme visible par transparence. ça parait volontaire, comme si le modèle voyait l'arrière de la toile derrière laquelle se trouve le peintre, représenté par des traits en ressorts qui évoquent ses mouvements et sa présence

 

1969 - 22

1969 - on se rapproche de la date du dessin présenté en tête d'article (1970)
Modèle, peintre et tableau sont représentés de face, l'aspect charnel est criant et volontairement vulgaire. Je vois ce tableau comme un cri adressé aux voyeurs imbélices venus voir le Modèle (nu) et l'Artiste (excentrique).

 

1969

1969 encore - peintre et modèle au corps à corps, le tableau a disparu, seuls demeurent les pinceaux et la palette. Les corps ne se mèlent pas.

 

Les dessins de juin et juillet 1970 sont faits en série, datés et numérotés, il permettent de suivre la relation du peintre et de son modèle à la manière d'une bande dessinée :

1970 - 27

27 juin 1970 - Ce dessin est le premier que j'ai retrouvé où les éléments sont positionnés de la même manière que sur le dessin présenté au salon - la pose du modèle est très lascive - beaucoup de sensualité dans la tenue du pinceau par la main du peintre - une représentation sans équivoque du désir.

 

1970 - 30

30 juin 1970 - "notre" dessin - l'érotisme est extrêmement discret, les formes sont tendres, la représentation est à la fois plus froide (intellectualisée) et plus douce. L'accent est mis sur l'esthétique. Le trait est réfléchi. Langage graphique adapté, lignes pures, beaucoup de courbes.

 

1970 - 02

2 juillet 1970 - ce qui se trouvait dans le dessin précédent sous une forme discrète se montre plus apparent. l'accent est mis sur l'aspect charnel, mais encore intellectualisé. Usage d'un langage graphique toujours à base de traits. Le peintre est extrêmement concentré sur la toile, il lève et abaisse le regard, sa main droite est en pleine action, on le sent concentré sur l'acte de peindre, mais avec en arrière plan de sa pensée la vision d'un modèle sexuellement offert. Beaucoup de lignes droites dans les tracés mais aussi des courbes. Dualité dans la composition. Partie gauche/partie droite très dissemblables.

 

Le 4 juillet 1970, Picasso fait toute une série de dessins dans la même journée, où la pointe du pinceau semble toucher à la fois le ventre du modèle et le tableau. Ils sont comme un film où le modèle va progressivement passer derrière le tableau, se redresser, ouvrir les yeux, faire face au peintre et le regarder. C'est une histoire sans paroles.

 

1970 - 04

Aucune dureté dans le trait, il y a même une certaine mollesse dans les courbes.

 

1970 - 04

 

1970 - 04

 

1970 - 04

 

1970 - 04

 

Toujours le 4 juillet 1970, sur le dessin n° VIII, les hanches du modèle sont représentées beaucoup plus fines, celle-ci est complètement redressée, sa tête est plus grande, le regard grand ouvert est dirigé vers le peintre. Les yeux de celui-ci sont fixés à la fois sur elle et sur le tableau :

 

1970 - 04

 

Le 6 juillet, le modèle s'est éloigné du peintre à tel point que ses jambes sont visibles en entier. Le langage graphique est complètement différent. Beaucoup de surcharges dans les hachures, qui "enjolivent" le dessin et s'y attardent. De manière inutile et juste pour le plaisir, puisqu'elles sont inutiles au discours. Le peintre "fait joli", il décore.

 

1970 - 06

 

Le 17 juillet, retour à un tracé minimaliste, très comparable au dessin du 30 juin. le peintre semble absorbé par sa toile, il s'en est approché. Le modèle occupe une double position, à la fois en arrière plan et entre le peintre et sa toile. Le peintre a le regard grand ouvert, les yeux du modèle sont fermés.  Le peintre est comme seul avec sa peinture et concentré sur elle.

 

1970 - 17

 

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29 avril 2014

Salon du dessin 2014 - Femme voilée de noir - Théodule Augustin Ribot

 

J'en ai parlé dans mon premier article consacré au salon. C'est un dessin à l'encre de chine et lavis de chine de Théodule Augustin Ribot. Je noté le nom et la technique sur mon carnet, et de retour à la maison j'en ai cherché une image sur le net, que je n'ai pas trouvée, à ma grande déception.

Pourquoi être particulièrement déçue de ne pas retrouver trace de ce dessin en particulier ? Parce que quand je me suis trouvée devant lui mon regard a été aimanté. J'avais du mal à en détourner les yeux, et ils y revenaient malgré moi. Je me suis reculée, j'ai regardé le dessin de plusieurs points de vue, je devais avoir une expression abasourdie sur le visage, j'ai vu quelqu'un regarder mon petit manège d'un air amusé.

Il se trouve que je ne suis pas la seule à avoir été touchée par ce dessin. A ma très grande joie Sandrine l'a été aussi, à tel point qu'elle l'a prise en photo. Cela va me permettre d'essayer de comprendre la magie particulière de ce dessin.

 

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Femme voilée de noir - Théodule Augustin Ribot - photo Sandrine Gateau

 

Le sujet est frappant par sa simplicité. Un visage pale sur un fond noir. Il n'y a pas de regard, les yeux sont mi-clos, on a du mal à déchiffrer l'expression de cette femme. La joue qui fait face à nous est dans l'ombre, c'est la joue opposée qui est dans la lumière, comme si celle-ci venait de l'intérieur du tableau.

La seule fois (avant celle-ci) où je suis restée aimantée devant une oeuvre dans un musée, c'était devant la croix noire sur fond blanc de Malevitch, au Centre Pompidou. Je n'arrivais pas à m'en détacher, j'ai l'impression que le temps s'est arrêté pendant que je le regardais. Quand on regarde fixement ce tableau, la lumière qui en sort va en augmentant, jusqu'à devenir aveuglante.

 

Le point commun entre ces deux oeuvres c'est l'impression d'émanation de lumière. On pourrait dire qu'elle nait de la confrontation du noir et du blanc, mais si je prends une feuille noire que je découpe en forme de croix et que je l'applique sur une feuille blanche ça ne suffira pas. Ce n'est pas du blanc pur c'est un dégradé de nuances, même chose pour le noir.

C'est donc un effet d'optique qui exerce cette fascination, mais il y a plus que ça.

 

Le sujet n'est anodin ni dans un cas ni dans l'autre. Il s'agit peut-être là des deux sujets les plus à même d'attirer notre attention et surtout de la retenir.

- un visage, dont on cherche à comprendre l'expression. Si La Joconde fascine les gens c'est bien à cause ou grâce à cela en grande partie... son fameux sourire enigmatique.

- une croix, associée à un phénomène lumineux, a forcément un contenu religieux dans l'inconscient collectif, qu'on soit chrétien ou pas. La lumière a une présence spirituelle qui fascine.

 

femme-voilee-ribot-2

 

3I01501

"Croix noire" - huile sur toile - 80 x 80 cm - Malevitch

 

"Malevitch réalise cette toile en même temps qu’une trentaine d’autres, pour une exposition qu’il organise en collaboration avec Jean Pougny, à Saint-Pétersbourg, en décembre 1915.

Par cette manifestation qu’il intitule lui-même "La dernière exposition futuriste", il entend rompre avec les avant-gardes occidentales et, par-delà cette opposition, retrouver un "zéro des formes", c’est-à-dire faire table rase, pour amorcer une reconstruction, non pas révolutionnaire ou fracassante, mais infinitésimale.

Il y montre pour la première fois ses œuvres abstraites qui incarnent l’idée d’un art à la limite du néant, d’un Rien pensé comme interface entre le visible et l’invisible. En quête d’un être suprême au-delà du monde des objets, l’art de Malevitch, le suprématisme, purifie la peinture en écartant tout ce qui la détourne de son sens. Quant au rôle de la croix dans cette pensée suprématiste, Malevitch l’explicite rétrospectivement dans ses écrits théoriques. Elle est l’un des éléments de base de son système plastique, le "deuxième élément suprématiste fondamental", le premier étant le cercle. Quant au carré, il constitue le référent absolu du système, c’est-à-dire la forme zéro à partir de laquelle toute unité visuelle est dérivée. Tandis que le cercle vient de la rotation du carré, la croix est obtenue par la division du carré en deux rectangles dont l’un pivote sur l’autre à 90°.

Mais la rigueur géométrique qu’évoquent ces indications est tempérée par les irrégularités que le peintre a introduites dans sa toile. Les contours incertains des branches, leur infime inclinaison, la précarité de leur équilibre invitent aussi à considérer la croix, récurrente dans l’œuvre entière de Malevitch, comme un élément chargé d’émotion. Le sculpteur Antoine Pevsner en témoigne lorsqu’il rapporte des propos confiés au cours de l’enterrement d’une amie artiste en 1918: "Quand il me vit, il me dit tout bas: nous serons tous crucifiés. Ma croix, je l’ai déjà préparée. Tu l’as sûrement remarquée dans mes tableaux".

 Source : Site du Centre Pompidou

 

Théodule Ribot, né à Saint-Nicolas-d'Attez (Eure) le 8 août 1823 et mort à Colombes (Hauts-de-Seine) le 11 septembre 1891, est un peintre réaliste français.

 

J'ai retrouvé l'utilisation de la confrontation des blancs et des noirs dans plusieurs de ses oeuvres, par exemple dans celle-ci, où l'émanation lumineuse sert le spirituel.

 

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Cet artiste a représenté des femmes voilées de noir à de nombreuses reprises, mais je n'ai retrouvé chez aucune de celles que j'ai vues la qualité lumineuse des blancs présente dans le dessin qui se trouvait au salon.

 

Voici deux autres beaux dessins de Théodule Ribot.

 

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Et cet auto-portrait est vraiment étonnant. Je suppose que ce tableau quand on le voit en vrai exerce lui aussi une certaine fascination.

Encore une histoire d'éclairage...

 

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28 avril 2014

Salon du dessin 2014 - Deux fox terriers - Francis Picabia

 

nez

Une truffe

 

oeil

Un oeil

 

oreille

Une oreille

 

pelage

Du pelage

 

barbe

Des poils sous le menton

 

Ce sont les lettres du mot "fox-terrier" écrit par Francis Picabia. Mais le dessin dit beaucoup plus que "chien". Il dit : "attention extrême et soutenue", il dit : "profil aérodynamique", il dit : "regard affuté", il dit : "muscles tendus près à l'action". Et ce qui permet de raconter tout cela, c'est la façon dont les lettres du mot sont liées.

Le langage graphique est d'une précision d'horloger, il va à l'essentiel et il le formule clairement. Trait affirmé et net, contour juste, pour le nez et l'oeil, où se concentrent toute l'attention et la fixité du chien. Trait "mouvant" pour l'oreille, qui se pointe vers l'avant. Traits en tous sens pour évoquer le pelage du chien. Et ce qui lie tout cela, ce sont les lignes... le dessus de la tête, de la pointe du nez à la nuque, et la courbe de la gorge, qui porte la tête en avant. Tout est tendu, près au départ.

Je ne peux pas m'empêcher en voyant ce dessin de penser à une voiture de course et à son pilote.

ferrari_f12_profil

J'y vois une grande élégance dans le contenu et beaucoup de savoir faire dans la technique de dessin. L'aquarelle est discrète, mais joue un rôle de premier plan dans la réussite du dessin. L'ombre subtile de la joue suffit à rendre son relief. On sent les muscles et la machoire sous cette ombre. Pour exécuter ce dessin les moyens sont simples. Mais l'exécution est parfaite et le contenu est d'une grande richesse émotionnelle.

 

Picabia, 2 fox terriers, G

Graphite et pierre noire, aquarelle sur papier - 24 x 31 cm.

 

Je me suis fait toutes ces réflexions hier soir, en regardant longuement ce dessin. J'avoue que je ne connaissais rien de son auteur.

J'ai lu ce matin des résumés de sa biographie. Il y est dit que Francis Picabia aimait les voitures, au point d'en avoir possédé plus de 150. Cet amour immodéré a contribué à sa ruine. 

 

 

picabia_o

 Francis Picabia au volant d'une de ses voitures

 

Il est étonnant que cette passion soit passée dans le dessin de ces chiens, et que cela soit arrivé jusqu'à moi. La magie du dessin...

 

Nul doute que Francis Picabia aurait aimé les voitures d'aujourd'hui. Les voitures de course en 1926-1928 (date approximative du dessin) n'avaient pas le profil aérodynamique des fox-terriers. La voiture de course en 1927 c'était ça :

 

Type_48

Peugeot 201X - 1927


Modèle de compétition équipé d'un moteur de 994 cm3 à arbre à cames en tête développé par Bugatti, fabriqué à une vingtaine d'exemplaires. Elles atteignaient 135 km/h.

26 avril 2014

Salon du dessin 2014 - Celle qui fut la Belle Heaulmière - Auguste Rodin

 

J'ai choisi de mettre en lumière ce dessin d'Auguste Rodin. Je réalise seulement maintenant à quel point il ressemble étonnamment à celui de Jan Toorop.

Les images confrontées du dessin et de la sculpture me permettent d'illustrer pourquoi je donne ma préférence au dessin par rapport aux autres modes d'expression artistiques : il est sans aucun doute plus proche de l'idée et du coeur. Grâce à la simplicité et à la rapidité des moyens employés. Je pense que c'est la raison pour laquelle il me touche davantage. La sculpture a des qualités esthétiques supplémentaires je ne le nie pas. Elle est à la fois "plus" et "moins" que le dessin. Je ne sais pas pourquoi je suis plus sensible dans un cas que dans l'autre, tout cela est bien mystérieux.

Il me vient l'idée que ce qui différencie les deux c'est la main de l'artiste, que je sens dans l'écriture, tellement expressive. Oui, c'est cela que j'aime.

 

auguste rodin

 

F092-rodin-belle-heaulmiere-2-f

 

 

"Cette œuvre est intitulée Celle qui fut la Belle Heaulmière. L'artiste n'a pas hésité à évoquer les outrages du temps qui marquent le modèle et illustrent éloquemment la vieillesse. La chair de la femme a perdu toute sa fraîcheur, les bras sont comme décharnés et l'attitude du modèle laisse transparaître un sentiment de pudeur, voire de honte. Mais Rodin a conçu cette sculpture avec le souci d'exprimer la beauté, une beauté capable de se dégager d'un corps tel que celui de cette vieille femme car l'artiste considère que tout ce qui est dans la nature est beau. L'original de cette statue, en bronze, fait partie de la composition monumentale de La Porte de l'Enfer qui fut remontée dans le musée Rodin de Paris après la mort de l'artiste."

 

Les regrets de la belle heaulmière

Advis m'est que j'oy regreter
La belle qui fut hëaulmiere,
Soy jeune fille soushaicter
Et parler en telle maniere:
`Ha! viellesse felonne et fiere,
Pourquoi m'as si tost abatue
(…)
"Qu'est devenu ce front poly,
Ces cheveulx blons, sourcilz voultiz,
Grant entroeil, le regart joly,
Dont prenoie les plus soubtilz;
Ce beau nez droit, grant ne petit;
Ces petites joinctes oreilles,
Menton fourchu, cler vis traictiz,
Et ces belles levres vermeilles?
LIII
"Ces gentes espaulles menues;
Ces bras longs et ces mains traictisses;
Petiz tetins, hanches charnues,
Eslevées, propres, faictisses
A tenir amoureuses lisses;
Ces larges rains, ce sadinet
Assis sur grosses fermes cuisses,
Dedens son petit jardinet?
LIV
"Le front ridé, les cheveux gris,
Les sourcilz cheuz, les yeulz estains,
Qui faisoient regars et ris,
Dont mains marchans furent attains;
Nez courbes, de beaulté loingtains;
Oreilles pendans et moussues;
Le vis pally, mort et destains;
Menton froncé, levres peaussues:
LV
"C'est d'umaine beaulté l'yssue!
Les bras cours et les mains contraites,
Les espaulles toutes bossues;
Mamelles, quoy! toutes retraites;
Telles les hanches que les tetes.
Du sadinet, fy! Quant des cuisses,
Cuisses ne sont plus, mais cuissetes,
Grivelées comme saulcisses.
LVI
"Ainsi le bon temps regretons
Entre nous, povres vielles sotes,
Assises bas, à crouppetons,
Tout en ung tas comme pelotes,
A petit feu de chenevotes
Tost allumées, tost estaintes;
Et jadis fusmes si mignotes!
Ainsi emprent à mains et maintes."


François Villon, Le Testament

 

"Villon, "La belle heaulmière"

 

"Dans le texte de Villon, il est donc fait allusion à la beauté perdue de la belle heaulmière. Encore faut-il savoir ce qu’est une heaulmière.

Le terme nous semblera plus familier si on supprime la lettre « l » intermédiaire. Heaumière renvoie alors manifestement à heaume, c’est-à-dire au casque porté par les hommes d’armes du Moyen Age. Ce casque enveloppait la tête et le visage et était muni d’ouvertures pour les yeux.

Dans la Chanson de Roland, le terme est orthographié « helme » et vient de l’ancien francique « helm », qui signifie casque (voir allemand et néerlandais actuels). Le mot a été latinisé en helmus au VII° siècle et on le retrouver sous cette forme dans les Gloses de Reichenau.

Pour rappel, les Gloses de Raichenau sont un glossaire de mots romans interprétant des termes de la Vulgate (traduction latine officielle de la Bible) et qui prouve par ailleurs que le latin n’était plus compris puisqu’il fallait le traduire.

Dès lors, si le heaume est un casque, le heaumier désigne la personne qui fabrique ce casque. La heaumerie, quant à elle, renvoie à l’atelier de fabrication et la heaumière est la femme du heaumier .

Ici, Villon fait allusion à une dame qui, à Paris, avait été célèbre pour sa beauté à une certaine époque. Le thème qu’il développe est finalement assez courant : vanité des biens terrestres et égalité de tous devant la mort. Il faut se remettre dans le contexte du Moyen Age pour en saisir toute la portée : d’une part la vie y est précaire (absence de médecine, mortalité élevée, etc.) et d’autre part la religion prédomine tout le mode de pensée. Elle se présente en effet comme une consolation devant la misère ambiante en proposant une vie éternelle en laquelle tout le monde semble croire. Les gens modestes ou frappés par le sort y trouvent donc une sorte de consolation (voire de vengeance) : la mort abolit les différences sociales et traite tout le monde avec égalité. Il s’agit finalement d’une sorte d’idéologie communiste post-mortem, si on y réfléchit bien, l’aspiration à un régime égalitaire, une sorte de Grand Soir qui se concrétisera dans le paradis promis par le Christ.

Mais revenons au texte de Villon. Celui-ci-, habillement, feint de faire parler la belle heaumière, afin de rendre son texte plus vivant et dès lors plus poignant. Elle se révolte contre la vieillesse félonne et regrette de n’avoir pas joui davantage de sa jeunesse. Puis elle passe en revue son corps décrépi et le compare avec son aspect antérieur (« Qu'est devenu ce front poly ces cheveulx blons, sourcilz voultiz »),non sans à l’occasion risquer une pointe érotique (« ces belles levres vermeilles », les seins menus, les hanches bien développées faites pour « tenir amoureuses lisses », le sadinet (ce qui est gracieux, doux, agréable) dans son jardinet au haut des cuisses (qu’en termes galants ces choses-là sont dites…).

Le contraste est saisissant entre la situation d’antan et ce que la belle est devenue. Son front est ridé, le regard rieur qui attirait les marchands est éteint, le visage est pâle, etc. Villon ne se contente donc pas d’une réflexion théorique sur la fuite du temps, mais entre dans des descriptions physiques qui sont plus parlantes qu’un long discours. En agissant de la sorte et en faisant tenir tous les propos par la dame qui a perdu ses attraits, il renforce le côté dramatique de la scène.

De plus, la belle heaumière passe subitement à la première personne du pluriel. Elle ne se plaint donc pas seule mais s’exprime au nom de toutes les femmes, ce qui renforce la teneur de ses propos. La description physique ne concernait que son seul corps (ce corps merveilleux qui avait fait sa réputation), mais la conclusion se veut générale. Il n’y a pas qu’elle qui est touchée par la fuite du temps, mais c’est toute l’humanité qui est concernée.

Les vieilles parlent entre elles de leur passé (« Ainsi le bon temps regretons Entre nous, povres vielles sotes »). Elles ne semblent pas avoir d’autres interlocutrices qu’elles-mêmes, ce qui renforce leur solitude. Ce n’est pas à la jeunesse qu’elle font la morale. Isolées, rejetées peut-être, c’est avec d’autres vieilles qu’elles parlent de leur malheur, constituant ainsi un microcosme de personnes séniles. Cette mise à l’écart sociale renforce une nouvelle fois leur décrépitude.

Villon est donc passé de la description d’un corps jeune et beau à celui d’une ancêtre (sous la forme du monologue de la belle heaumière), puis il a étendu le procédé en imaginant ce dialogue entre les vieilles.

Tout est alors mis en œuvre pour renforcer leur décrépitude et leur malheur. Ainsi elles ne sont pas assises mais sont « à crouppetons » devant le feu. Peut-être faut-il y voir un signe de leur pauvreté matérielle (elles n’ont même plus de chaises) mais peut-être aussi est-ce pour elles une manière de mieux se réchauffer (la mort approchant, leurs membres sont déjà froids). Ce qui est sûr, c’est que leur position a quelque chose de misérable qui tranche avec leur beauté altière d’autrefois. Ramassées en tas, on se demande si elles ont encore forme humaine.

Notons qu’elles ne se réchauffent pas auprès d’un bon feu, mais d’un petit feu de chènevotte (partie ligneuse du chanvre. L’idée est celle de la minceur du matériaux : ce combustible s’enflamme vite mais ne dure pas longtemps).C’est peut-être pour cela qu’il leur faut s’accroupir : pour mieux jouir de cette flamme éphémère. L’idée renvoie à la beauté du corps, tout aussi éphémère que cette flamme. Les vieilles, rassemblées autour de ce feu aussi vite allumé qu’éteint, parlent de leur jeunesse trop tôt évanouie. Nous avons donc un phénomène de mise en abyme, le décor présent étant une métaphore du thème développé.

Par ailleurs, les rimes en « otes » rapprochent « pelotes » et « chenevotes », ce qui renforce encore le côté dramatique de la scène : on insiste d’un côté sur l’aspect éphémère de le jeunesse, tandis que la vieillesse semble s’éterniser dans ce « tas » de vieilles amassées comme pelote, vieilles qui par ailleurs ne parviennent même plus à se réchauffer à ce feu qui ne dure qu’un instant (pas plus qu’elles ne parviennent à se consoler avec leurs souvenirs).

Puis vient ce vers « Et jadis fusmes si mignotes! » qui rappelle d’une manière bouleversante ce qu’elles furent avant d’être devenues ce qu’elles sont. Faut-il y voire une sorte de résignation ? Peut-être. En tout cas le dernier vers «Ainsi emprent à mains et maintes » propose une sorte de consolation. Cette situation qu’elles connaissent concerne en fait tout le monde. Piètre consolation, on en conviendra, mais qui renvoie à une définition du destin commun.

Poème profond et tragique que ce texte de Villon, qui décrit en quelques strophes l’histoire d’un parcours individuel. Dans la poème suivant (« Ballade de la belle Heaumière aux filles de joie), il propose une sorte d’épicurisme : profitez de la vie et des plaisirs du corps pendant qu’il est encore temps car la vieillesse n’est que «monnoie qu'on décrie » ."

Source : Marche Romane

12 août 2013

Valentin Serov

On peut tomber amoureuse d'un peintre ? De sa sensibilité, de son regard...

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Valentin Serov, dessinateur, portraitiste, peintre de génie.

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Au hazard de mes balades sur le net, cette toile a retenu mon regard, incroyablement bonne et tellement moderne.

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J'ai cherché qui en était l'auteur. C'était aussi celui de ce dessin, que j'adore. Valentin Serov, c'est encore...

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girls-n-a-kasyanova-and-t-a-kasyanova-1907

girl-with-peaches-1887

greyhound-royal-hunting-1902

greyhounds-royal-hunting-1901

horses-on-a-shore-1905

mika-morozov-1901

misha-serov

october-1898

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portrait-of-a-kasyanov-1907

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portrait-of-anna-benois-1908

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portrait-of-a-p-nurok-1899

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portrait-of-dmitry-stasov-1908

portrait-of-helena-ivanovna-roerich-1909

portrait-of-henrietta-girshman-1906

portrait-of-henrietta-girshman-1907

portrait-of-henrietta-girshman-1911

Vous la voyez ? L'âme des gens saisie au travers d'un regard, et restituée d'un trait de crayon, d'un coup de pinceau...

portrait-of-ivan-morozov-1910

portrait-of-izabella-grunberg-1910

portrait-of-k-a-obninskaya-with-bunny-1904

Si c'était un photographe on dirait qu'il a l'art de prendre ses portraits sur le vif...

portrait-of-konstantin-stanislavski-1908

portrait-of-k-pobedonostsev-1902

portrait-of-leo-bakst

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portrait-of-nadezhda-derviz-with-her-child-1889

Mais c'est un peintre. ça s'appelle l'intelligence, ça s'appelle le talent...

portrait-of-n-z-rappoport-1908

Et avant tout ça s'appelle la sensibilité.

portrait-of-princess-zinaida-yusupova-1902

portrait-of-p-semenov-tien-shansky-1905

portrait-of-sophia-dragomirova-lukomskaya-1900

portrait-of-the-artist-a-p-ostroumova-lebedeva-1899

Valentin Serov, vous faites battre mon coeur plus fort...

portrait-of-the-artist-ilya-repin-1901

portrait-of-the-artist-i-s-ostroukhov-1902

portrait-of-the-artist-pavel-tchistyakov-1881

portrait-of-the-pianist-wanda-landowska-1907

portrait-of-the-poet-konstantin-balmont-1905

J'aime tout de vous.

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portrait-of-yelena-oliv-1905

portrait-of-yevdokia-loseva-1903

pushkin-in-the-village-1899

the-wolf-and-the-shepherds-1898

Mais bien sûr, vous n'en avez rien à faire.

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28 juin 2013

Picasso - Propos sur l'Art - 6

Laisser respirer la couleur :

"Dans l'oeuvre de Matisse, quand on trouve trois tons, côte à côte -par exemple un vert, un mauve et un turquoise- leur rapport est heureux et détermine une résultante qui est la couleur. Vous l'avez entendu dire " il faut laisser à chaque ton sa zone d'expansion." Là-dessus, je suis absolument d'accord avec lui ; chaque ton émet une onde qui se propage. Si l'on tente de le contenir à l'intérieur d'un graphisme noir, par exemple, on l'annihile, en tout cas sur le plan pictural : on détruit son rayonnement. Il faut ménager des intervalles. Une couleur n'a pas besoin d'avoir une forme définie. Ce n'est même pas désirable. Quand elle atteint un point un peu au-delà de ses limites, elle s'irradie jusqu'à la zone neutre, et l'autre teinte la rejoint au bout de sa course. A ce moment-là, on peut dire que la couleur respire. Matisse peint ainsi."

 

matisse dishes-and-fruit-on-a-red-and-black-carpet-1901Matisse

 

Portrait :

"Un artiste n'est pas aussi libre qu'on pourrait le croire. C'est vrai aussi pour les portraits que j'ai faits de Dora Maar. Pour moi, c'est une femme qui pleure. Pendant des années, je l'ai peinte en formes torturées, non par sadisme ou par plaisir. Je ne faisais que suivre la vision qui s'imposait à moi. C'était la réalité profonde de Dora. Vous voyez, un peintre a des limites, et ce ne sont pas toujours celles qu'on imagine."

 

PortraitDeDoraMaar-37-061Picasso- portrait de Dora Maar

"Il y a une revanche des choses... A force de peindre les visages par l'intérieur, il m'est impossible de n'être plus qu'un portraitiste. D'ailleurs, je ne peux pas faire le portrait de n'importe qui... Il y a longtemps que je ne prends plus de "modèles " au sens où les gens l'entendent."

1898 Portrait de Josefa Sabastia Membrado Picasso - 1898 Portrait de Josefa Sabastia Membrado

1915 Portrait de Max JacobPicasso - Portrait de Max Jacob - 1915

1919 Portrait d'André DerainPortrait d'André Derain - Picasso 1919

 

Cheminement de la pensée :

"Ma pensée, quand je peins, est souvent une suite de coq-à-l'âne, une série de sauts d'un sommet à l'autre."

 

Expériences :

"Mon atelier, c'est une sorte de laboratoire. Comme dans toutes les expériences, il y en a qui réussissent et d'autres qui ratent. Les gens veulent tout... Pour aimer ma peinture, il faut vraiment qu'ils soient masochistes... Il y a des jours où je me dis que, dans toutes ces recherches, j'ai traîné mon talent dans la boue. Il se trouve que mes tableaux sont jolis ou qu'on les trouve tels. Tant mieux. L'intéressant, c'est leur création, l'addition de chaque ligne, le passage d'un état à un autre. C'est la peinture, en même temps poème et philosophie."

 

Emotion :

"Un tableau est destiné à faire naître des émotions dans l'âme de celui qui regarde. Il ne faut pas qu'un homme reste indifférent devant une oeuvre d'art, qu'il passe en jetant un coup d'oeil négligent... il faut qu'il vibre, s'émeuve, crée à son tour, par l'imagination sinon effectivement... Le spectateur doit être arraché de sa torpeur, secoué, pris à la gorge, qu'il prenne conscience du monde dans lequel il vit et, pour cela, il faut d'abord l'en sortir..."

1915_1918_Crucifixion

Monde extérieur (à propos d'avoir peint peu de paysages) :

"Je n'ai jamais rien vu... J'ai toujours vécu en moi."

paysagePicasso - paysage - 1904

25 juin 2013

Picasso - Jeu de l'esprit - Poésie graphique

"Un atelier de peintre doit être un laboratoire. On n'y fait pas un métier de singe, on invente. la peinture est un jeu de l'esprit."

portrait-of-marie-thérèse-walter-1937-1Portrait de Marie Thérèse Walter - Picasso -1937

"Je ne cherche rien, je ne m'emploie qu'à mettre le plus d'humanité possible dans mes tableaux. Tant pis si cela offense quelques idolâtres de l'effigie humaine conventionnelle. Ils n'ont d'ailleurs qu'à se regarder un peu plus attentivement dans une glace... Qu'est-ce qu'un visage, au fond ? sa photo ? son maquillage ? Ou le visage comme l'a représenté tel ou tel peintre ? Ce qui est devant ? dedans ? derrière ? Et le reste ? Chacun, ne le voit-il pas à sa façon ? Il n'existe guère de déformations. Daumier et Lautrec voyaient le visage autrement qu'Ingres ou Renoir, c'est tout. Moi, je le vois ainsi... Or, je ne peins que ce que je vois. Je l'ai vu, je l'ai senti, peut-être différemment à d'autres époques de ma vie, mais je n'ai jamais peint que ce que j'ai vu et senti. La façon de peindre d'un peintre, c'est comme son écriture pour les graphologues. C'est l'homme tout entier qui est dedans. Le reste, c'est de la littérature, l'affaire des commentateurs, de la critique. Cela ne regarde plus le peintre."

1913 Violon, bouteille et cartes à jouer sur une table rondeViolon, bouteille et cartes à jouer sur une table ronde - Picasso - 1913

"Voyez ces dessins : ce n'est nullement parce que j'ai voulu les styliser qu'ils sont devenus ce qu'ils sont. C'est tout simplement le superficiel qui est parti de lui-même. Je n'ai rien recherché "exprès"... Evidemment, pour cela il n'y a pas d'autre clef que celle de la poésie... Si les lignes et les formes riment et s'animent, c'est à l'instar d'un poème. Pour cela, il n'y a pas besoin de beaucoup de mots. Il y a parfois dans deux ou trois lignes bien plus de poésie que dans un très long poème."

24 juin 2013

Picasso - le trait juste

1897-1899 L'artiste dessinant et études de mains

Tracer d'observation - trait maîtrisé, direct, concentré et exact.

1899 Femme nue cachant son visage

Trait affirmé, réduit à l'essentiel, pureté et simplicité des formes, représenter l'idée.

1900-1901 Homme assis à la canne et masque

Trait sensible et varié, trait expressif, qui s'adapte au sujet et devient le sujet.

1901 Etreinte

Trait qui réfléchit et qui cherche, qui inscrit le trajet de la pensée, qui cerne l'idée et la sensation et s'en approche au plus près possible.

1912-1913 Tête de femme

Trait qui s'amuse avec les formes, les lignes et les points. Et qui demeure expressif, malgré tout. Délivrer quelque chose de complexe - une personnalité - une expression - un sentiment - à partir de signes simples. Abstraire/réduire et tout en réduisant, développer. 

1917-1919 Autoportrait

Trait juste et vrai, réduit à l'essentiel

1918 Coq

Trait calligraphique, signe graphique. 

Ne pas représenter le réel, mais le "sur-réel". Au delà d'un coq, tous les coqs. Au delà de l'enveloppe extérieure des amoureux, l'étreinte, au delà du visage, l'âme.

"En peinture tout n'est que signe"

Je tiens à la ressemblance plus profonde, plus réelle que le réel, atteignant le sur-réel... à vrai dire, il ne s'agit que de signes. On est convenu que tel signe représente un arbre, tel autre, une maison, un homme, une femme : tout comme dans le langage, le mot "homme" évoque dans notre esprit l'image d'un homme, le mot "maison", une maison, et cela dans toutes les langues, bien que, dans chaque langue, le mot varie. c'est une convention établie, on communique par l'usage de ces signes."

"Rien n'est plus difficile qu'un trait. Personne ne sait combien il faut penser un trait."

28 mai 2013

Vincent Van Gogh - Dessins - 1890

Branch-with-Leaves

Cypresses-with-Four-People-Working-in-the-Field

Cypresses-with-Two-Women-in-the-Foreground

Dead-Leaf-and-Pod

Enclosed-Field-with-a-Sower-in-the-Rain

Interior-of-a-Farm-with-Figures-at-the-Fireside

Lady-with-Checked-Dress-and-Hat

Peasant-Digging

Snow-Covered-Cottages-with-Cypresses-and-Figures

Sun-over-Walled-Wheat-Field

Country-Road

1890 - C'est la dernière année. Je perçois ces dessins comme un regard jeté en arrière, sur des styles et des sujets anciens, comme des souvenirs revisités.

Ici s'achève mon étude de la correspondance et des dessins de Van Gogh. Si j'étais étudiante je ne le lâcherai pas de si tôt et je pourrais y consacrer une thèse. Il y a tant d'aspects que je n'ai pas approfondis. La dimension littéraire de sa correspondance et ses nombreuses références, la théorie de la couleur, l'emploi de la touche en tant que language, les caractéristiques psychologiques de sa personnalité et ses impacts sur son écriture graphique... il y a de quoi y consacrer une vie. Ce n'est pas souhaitable, on peut s'y engloutir complètement.

Je pense que je vais m'intéresser à cet autre personnage fascinant qu'est Picasso. Et comme je l'ai fait pour Van Gogh, faire connaissance avec lui à partir de ses oeuvres et de ses écrits.

Références :

http://www.vangoghgallery.com.

Vincent Van Gogh - Correspondance générale T1,2,3 Biblos Gallimard

(Il est préférable de lire les articles dans l'ordre chronologique - ils sont accessibles en cliquant sur les tags "dessins de Van Gogh" et "Van Gogh" ci-dessous).

28 mai 2013

Vincent Van Gogh - Dessins - 1888

Le 20 février 1888 Vincent s'installe seul à Arles. Il adopte dans son dessin, mais aussi dans sa peinture, l'écriture graphique qu'on lui connaît le plus. C'est un language qu'il avait déjà utilisé en 1881, mais qu'il enrichit de nouveaux signes et de l'esprit du Japon.

1881Marsh-with-Water-Lillies(vincent van Gogh 1881)

Pendant l'année 1888 on peut dire qu'il subit une véritable explosion créative, période pendant laquelle il produit des centaines de dessins et peintures qui sont autant de chefs d'oeuvres. Subit, parce que l'épuisement psychique et physique provoque un choc nerveux et une grave dépression nerveuse fin décembre.

Bank-of-the-Rhone-at-Arles

Cafe-Terrace-on-the-Place-du-Forum,-Arles,-at-Night,-The

Entrance-Gate-to-a-Farm-with-Haystacks

Field-of-Grass-with-a-Round-Clipped-Shrub

Fishing-Boats-at-Sea

Fishing-Boats-on-the-Beach-at-Saintes-Maries

Garden-with-Flowers,-A

Harvest-Landscape

Haystacks-near-a-Farm

Hill-with-the-Ruins-of-Montmajour

La-Crau-Seen-from-Montmajour

Landscape-with-Path-and-Pollard-Trees

Lawn-with-Weeping-Tree

Meadow-with-Flowers

Montmajour

Olive-Trees,-Montmajour

Orchard-with-Blossoming-Plum-Trees-(The-White-Orchard)

Plain-of-La-Crau,-The

Portrait-of-Patience-Escalier

Portrait-of-the-Postman-Joseph-Roulin

Quay-with-Men-Unloading-Sand-Barges

View-of-Arles-from-a-Hill

View-of-Saintes-Maries-with-Church-and-Ramparts

Wheat-Field

Wheat-Field-with-Sheaves

Wheat-Field-with-Sheaves-and-Arles-in-the-Background

Zouave,-Half-Figure

Zouave,-Half-Figure

 

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