A la dernière séance nous nous étions arrêtés à la limite du premier plan.
Cette fois j'ai pris des notes pendant que notre prof faisait la démonstration de la suite sur sa propre toile. En voici la transcription :
"Pour faire le premier plan, je garde les mêmes couleurs que les fonds intiaux en les forçant. Je les rends plus puissants ce qui va les rapprocher. Dans le lointain j'étais dans le flou, plus je m'approche du premier plan plus je détaille.
Je procède toujours par plans. Je commence par le pré à droite. Je le fais ressortir sur les bosquets qui sont foncés derrière en choisissant un ton plus clair. Je fais des cassures avec des petites touches nuancées tout en gardant une unité.
On imagine le talus sous le pré à l'ombre, on va donc le faire plus foncé. On choisit pour cela une couleur plus forte. Elle sera plus claire à gauche (en s'éloignant) qu'à droite (plus proche).
J'utilise un pinceau-éventail à poils assez raides pour dessiner des herbes. Je mouille le pinceau de White spirit, je l'essuie. Je prépare ma couleur sur la palette. Je prélève de la peinture avec le coin du pinceau et je la pose en tenant le pinceau à mi-manche, tête vers le haut, d'un mouvement montant en effleurant la toile. Je griffe du bas vers le haut. J'essuie le pinceau, je recommence.
Je fais les poteaux de la cloture avant l'herbe. Les herbes vont recouvrir en partie les poteaux. Je prends pour cela un bleu clair et une terre de sienne. Je réalise les piquets en trois nuances. Une couleur foncée, une claire et une entre deux. La plus claire du coté éclairé. Je mets de la lumière en haut du poteau également. Pour faire les fils de la cloture, je vais prendre une couleur claire si le fond est foncé et foncée s'il doit ressortir sur du clair. Je peins le fil en prélevant de la peinture sur le tranchant de la lame du couteau et en la posant en un geste. Sur le tranchant : on pose, on tire. Ne pas peindre des fils tout le long, éviter de faire les poteaux trop droits ou trop verticaux.
Le talus à gauche : je le force sur le devant. J'utilise du blanc pour éclaircir les couleurs dans les arrières plans mais jamais dans les premiers plans, cela éteint les couleurs. J'utilise alors du jaune ou du crème.
L'arbre : le faire fort : c'est le sujet principal du tableau, avec le chemin. J'utilise du bleu de prusse, terre de sienne, vert de vessie, terre d'ombre brûlée. Je fais des tâches plus foncées, j'en pose un peu partout. Le haut de l'arbre ne doit pas toucher la ligne d'horizon, le faire plus haut ou plus bas que celle-ci. Les couleurs plus claires se posent après. Un conseil : ne pas utiliser trop de couleurs dans un tableau, ne pas barioler. Avec le grand couteau, je pose dans les trous, j'essuie, je recommence. Ensuite avec le petit couteau je fais encore plus clair. On laisse des trous, on tourne le couteau dans tous les sens. De la couleur plus claire en haut pour la lumière. Les branches sont faites avec le tranchant du couteau. Clair sur foncé ou foncé sur clair. Et ensuite repeindre du feuillage dessus.
Pour peindre la route, utiliser des couleurs de terre pour la transformer en chemin, plus interessant qu'une route goudronnée. Ne pas mélanger les couleurs completement sur la palette. Poser les touches dans le sens du chemin en suivant sa courbe. Poser des touches d'ombre à droite le long du talus (pas partout). Des lumières avec le pinceau éventail à droite. Quelques touches plus nuancées sur le chemin."
Tout ce discours est tenu par le prof en même temps qu'il peint sur sa toile de démonstration. Je suis surtout occupée à noter et je jette quelques regards de temps en temps mais je suis mal placée pour voir. Le résultat est bluffant. Je soupire, je doute d'arriver à sortir quelque chose de potable. Tout est à faire d'imagination...
Arrivée devant ma toile je suis un peu découragée devant la surface à "remplir". Je commence en suivant la démarche du prof mais je trouve finalement qu'il serait plus simple de peindre de grands aplats que je retravaillerai ensuite. Le pré de gauche d'une couleur, celui de droite d'une autre, les talus plus foncés, le chemin avec quelques zones. Cela s'avère une bonne idée.
Je n'utilise pas les mêmes couleurs que le prof, j'ai voulu me contenter de la dizaine de couleurs "de base" que j'avais déjà. Les primaires entre-autres. Je dois donc faire mes propres mélanges "au feeling".
Je fais l'arbre. Je me recule. Ce n'est pas un arbre ce sont des tâches... Le pré, le chemin, ce n'est pas un pré, pas un chemin, mais des aplats de couleurs... J'ajoute quelques touches dans le pré pour nuancer. Je soupire je suis dégoutée. Je plante quelques poteaux.
Et d'un seul coup "ça y est". Je renonce à expliquer... C'est assez magique. Et très jubilatoire. A partir de cet instant le tableau se termine très rapidement.
J'ajoute quelques coquelicots non prévus au programme. Le prof me conseille de faire disparaître un peu le tournant du chemin, de prendre un peu d'herbe foncée pour la mettre dans l'herbe claire et vice versa. Ensuite il crie d'arrêter "voilà, c'est fini ! on n'y touche plus !!" et montre comment signer avec le tranchant du couteau. Nous dit de choisir un nom pour notre réalisation (il propose "Souffrance") :D
DCM - "Ma croute" - huile sur toile - 61 X 50 cm
Pour mémoire, voici la photocopie A4 N&B qui nous a servi de point de départ :
Même si ce n'est pas le chef d'oeuvre du siècle (tellement de choses à améliorer) le plaisir est là. J'adore cette technique. Il est prévu une séance de plus pour apprendre à faire l'eau sur un autre sujet (format 8P).
J'ai préparé la toile pour la prochaine séance avec une couche d'acrylique jaune. Le prof n'utilise pas de gesso. Je comprends maintenant pourquoi. Cette technique tire profit du fond jaune et des petits trous de la toile qui restent visibles sous les aplats posés au couteau. Cela apporte de la lumière et ne serait pas possible avec un enduit plus lissé.
Nous devons apporter nos toiles la fois prochaine pour en faire la critique. J'en profiterai pour prendre quelques photos.
J'ai acheté un bouquin "le nuancier de la peinture à l'huile" pour essayer de travailler sur mes soucis de couleurs (trop pétantes à mon goût). Et plein de toiles :)